C'est très paradoxal, mais j'ai toujours eu l'impression qu'une femme ne fusionne avec son enfant qu'après l'accouchement. Avant cet événement malheureux, elle est disponible, épanouie, presque offerte aux désirs que ses hormones lui inspirent. Après, elle se recroqueville sur son enfant et grogne lorsqu'on les approche. Et pour rester dans le paradoxe, c'est lorsqu'une femme est enceinte que la fornication offre le moins de risques de procréation. Remarquez, après l'accouchement, le risque est à peine plus élevé, étant confiné au siège des toilettes : le seul endroit où l'homme a encore un semblant de vie sexuelle, et qu'il partage avec son épouse. Comme si lors de l'accouchement, il se passait dans le corps de la femme la même chose que dans un yaourt la date de sa péremption : la matière se réorganise pour passer de crémeuse à toxique. D'ailleurs, du yaourt et de la femme enceinte, les deux contiennent du lait, et passé la date fatidique, celle-ci ne sert plus qu'à nourrir les parasites qu'on trouve généralement à l'intérieur. D'un autre côté, les yaourts ne montrent pas les dents lorsqu'on essaie de les manger, même après la date, et leurs parasites sentent moins mauvais. C'est dingue l'odeur répandue par le petit de la femme. C'est à jurer que les médecins n'ont pas cueilli le fruit du bon orifice. Pourtant, si on devait donner un numéro de sécu à tout ce qui sort de ce côté sombre de la force, il y a longtemps qu'on aurait ajouté des lettres et retiré les départements de l'immatriculation sociale. Je me demande si le fait de baigner le bébé dans une cuvette minuscule n'est pas là pour donner l'opportunité de faire semblant de tirer la chasse pour repartir sur de bonnes bases. Mais de toutes façons, le bébé ne sent jamais bon plus de cinq minutes. Vomi, pisse, merde, comment peut-on faire des câlins à ce truc ? Elles se plaignent de nos odeurs et transportent un cloaque énorme dans les bras ! Avant, je croyais que les femmes nous clonaient pour assouvir leur fantasme de domination du monde. Maintenant que j'ai un mini-moi, je comprends mieux pourquoi elles essaient depuis si longtemps sans succès. D'ailleurs, quand la femme se rend enfin à l'évidence et constate son échec, elle consent de nouveau à se laisser approcher afin de prélever d'autres échantillons d'ADN pour ses expériences. Elle garde toujours son premier résidu d'hybridation auprès d'elle pour l'étudier et s'améliorer. Et pourtant, j'ai beaucoup plus de conversation que lui.

 

Texte refusé pour le Psikopat sur la grossesse et l'accouchement de Février 2012.

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