Je t'ai raconté mon voyage en autocar ?
Tu te souviens, j'étais censé aller voir ma grand-mère qui habite à la campagne. Elle habite dans un coin tellement isolé qu'il fallait que je m'y rende en autocar. Aucun train ne passe à proximité, et de toutes façons, elle n'a pas de voiture. Je n'aime pas trop ce moyen de transport, mais comme tu vois, parfois on a pas le choix. Et puis ces quelques jours de repos m'auraient fait le plus grand bien. A chaque fois que je m'accorde des vacances, je rentre encore plus épuisé que lorsque je suis parti. Mais là, aucune chance. Imagine-toi le cadre : une vieille maison de pierre dotée d'une cheminée uniquement entourée d'arbres et de champs. C'était le lieu idéal pour oublier tous mes soucis. Encore aurait-il fallu y parvenir.

Mais laisse-moi t'expliquer comment ça s'est passé.
Nous étions assez nombreux dans le car, une bonne trentaine je pense. Le voyage n'était pas formidablement agréable, mais au moins j'étais bien assis et on ne faisait pas trop d'escales. Il en fallait bien quelques unes, mais on ne passait pas notre temps à attendre que ça redémarre. Au bout d'une demi-heure environ, un homme étrange est monté. Ses habits étaient tout sales et ses cheveux en bataille. Il n'avait pas l'air tout à fait dans son assiette, mais comme j'étais assis dans le fond, je n'ai rien dit. Ma voisine du siège à côté, une jeune femme assez forte, bonne vivante et dont le côté rural m'indiquait qu'elle rentrait probablement chez elle, se tourna vers moi. Apparemment, elle en avait déjà vu des comme ça, et la dernière fois ça s'était assez mal passé, il avait fallu que le chauffeur le mette dehors.

Mais cette fois-ci, ça ne risquait pas.
Quelques minutes à peine après son entrée, voilà déjà l'énergumène un couteau à la main en train de menacer le chauffeur. Il criait assez fort pour qu'on l'entende jusqu'ici, mais je crois bien que même ceux en première loge ne comprirent pas ses revendications. Un mélange de détournement, de hold-up et de prise d'otage. Encore un indécis complètement perturbé qui ne savait sans doute pas ce qu'il faisait. De plus, nous entrions dans une petite chaîne de montagnes et la route allait certainement demander de la concentration pour se laisser parcourir sans heurts. Au premier cri du vagabond, ma voisine s'était tournée vers moi et avait attrapé mon bras. Puis, elle s'était excusée, avec ses grands yeux, et je lui avais répondu que ce n'était pas nécessaire. Alors elle avait repris mon bras, et, même si je me retenais bien de le dire, je remerciais cet homme d'avoir provoqué pareille situation.

Mais je ne perdais pas de vue qu'il représentait une menace.
Alors, lorsqu'il força l'arrêt du car pour je ne sais quelle raison incompréhensible, j'en profitai pour déclencher l'ouverture de secours de la porte arrière et fis sortir ma voisine ainsi que quelques autres passagers. Il s'en rendit compte et obligea le chauffeur a repartir, mais bien trop tard, puisque nous étions déjà cinq dehors. Un petit grassouillet tenta de fuir après le départ du bus et sauta en route. Il glissa, roula, et passa sous la glissière de sécurité. Je menais notre petit groupe de l'autre côté de cette même glissière afin de voir si nous pourrions le secourir lorsque nous entendîmes le car, un peu plus loin, exploser les retenues pour plonger à travers elles dans le vide. Le fou avait dû s'ennerver sur le conducteur après notre fuite, et l'avait peut-être assassiné, sans même remarquer la conséquence directe de son geste. Quant au jeune homme qui avait voulu nous suivre, il ne nous était pas possible de le voir. Sa chute avait du le mener trop loin, et nous ne pouvions plus rien pour lui.

Je décidai alors de mener le groupe à l'écart de la route.
Le carnage était déjà largement suffisant, et il n'aurait pas fallu qu'en plus de ça l'un d'entre nous ne se fasse faucher par une voiture. Un petit chemin descendait dans la forêt, dans la direction opposée au sinistre. Lorsque le terrain se trouva être suffisamment plat, nous fîmes une pause. J'étais là, perdu au milieu de nulle part, avec ces quatre femmes reconnaissantes. Dont ma voisine de siège. Au premier coup d'oeil, je l'avais trouvée vraiment quelconque, mais ses formes m'avaient peu à peu envouté. Elle remarqua probablement l'appétit avec lequel je la regardais, puisqu'elle vint me voir et me remercia de ce que j'avais fait pour elle et ses amies. Puis, elle me proposa, la voix tremblante, si j'accepterais une forme plus concrète de remerciement. A ce moment, j'étais persuadé de me faire des idées. Celles-ci commençaient par ailleurs à me trahir, et j'avais peur que ça se voit.

Et il faut croire que ça se vit.
L'heure qui suivit fut un réel délice de réconfort et de luxure. Je ne saurais dire ce qui était le plus fabuleux dans ce moment magique. Etait-ce le fait d'avoir tant de femmes à ma disposition, ou encore celui de pouvoir en honorer une tandis que d'autres s'occupaient entre elles à quelques centimètres de mon visage, ou enfin de découvrir l'amour de la campagne, pur et naturel, sans la moindre tâche de retenue ou d'appréhension. Pourtant, je ne suis pas le dernier à apprécier la réticence, les jeux de séduction, et tout ce qui tourne autour de la fusion charnelle. Mais je dois admettre que de temps à autres, il est bon de pratiquer cette activité sans se poser trop de questions. Se laisser aller, se faire plaisir. Et question plaisir, mes partenaires semblaient spécialistes. D'ailleurs, c'est sans doute ça qui fut le plus excitant. De les voir expertes, maîtresses de leurs propres corps, sachant penser à elles avant tout, et d'avoir à les suivre dans leurs désirs. Pour une fois, se laisser guider, pour un résultat aussi explosif.

A la fin de la récréation, j'étais totalement fâné.
J'ai peut-être eu un petit moment d'absence, puisque lorsque j'ai repris conscience, j'étais seul. Mais pourquoi ne m'avaient-elles pas réveillé avant de s'en aller ? D'autant plus que je ne savais même pas où j'étais et qu'il commençait à se faire sacrément tard. Alors j'ai marché le long du chemin jusqu'à un petit village. De là, j'ai essayé de me repérer et j'ai trouvé la direction de la ville. Je m'y suis dirigé tout en faisant du stop jusqu'à ce que quelqu'un s'arrête pour me ramasser. Une femme assez âgée me laissa monter pour faire la conversation, mais je n'avais pas vraiment la force de participer. Visiblement, ça ne la gêna pas, et je me contentai d'écouter. La route fut bien moins longue au retour, probablement de par mon épuisement physique, mais peut-être aussi grâce à cette femme qui me raconta des histoires qui me bercèrent tout du long.

Et enfin, je suis rentré.
Sans avoir vu ma grand-mère, pour le coup. Mais je ne me sentais pas de repartir directement. Je préfère d'abord passer une nuit ici pour me reposer. C'est idiot n'est-ce pas ? Enfin, je veux me reposer avant de partir me mettre au vert, c'est bizarre. Paradoxal peut-être. Peu importe après tout. Quoi ? Tu veux que je te décrive les femmes que j'ai sauvées de l'autocar ? Ecoute, je veux bien, mais une autre fois, là je n'ai vraiment pas le courage, ça risque d'être décevant. Demain peut-être ? Tu pourras attendre ? C'est gentil merci.


... qui n'a pas encore été expertisé, mais tout laisse à penser qu'il s'agit d'un incident criminel. Des témoins étant descendus de l'autocar avant le drame affirment avoir remarqué un homme au comportement inhabituel, se parlant à lui même, et certains seraient même descendus pour ne pas poursuivre le voyage en sa compagnie. Toujours est-il qu'aucune trace de cet homme n'a pu être retrouvée parmi les vingt-neufs corps, et on le suspecte d'avoir pris la fuite avec des otages qu'il aurait par la suite assassinés, quatre femmes ayant été retrouvées mortes en contrebas de la route de montagne où le car aurait fait une halte peu avant le drame. Il n'est pas exclu qu'un autre meurtre ait été perpétré par la même personne, plus tard dans la soirée, une victime dont la voiture et le corps sans vie furent retrouvés...
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