<<- Début de l'histoire

Max vient de s'échouer sur une planète sombre qu'aucun manuel n'a jamais répertorié. Son vaisseau est non seulement hors d'usage, mais il contient en plus cent vingt-sept cadavres puants qui lui auraient été bien utiles s'ils avaient été encore vivants. Et, pire, il est responsable de la mort de chacun d'entre eux. En fait non, le pire, c'est qu'il a des réserves de nourriture décombinée qui, rapportées à lui seul, devraient lui permettre de survivre pendant trois ou quatre centaines d'années. Seulement, il n'a pas la moindre goutte d'eau pour faire fonctionner le préparateur qui compose les repas pour tout l'équipage. Même pas le moindre petit sachet d'eau lyophilisée qu'une goutte de sueur ou de salive aurait liquéfié en plusieurs litres d'eau pure. Mais Max, bien que le sort s'acharne sur lui quotidiennement, arrive toujours à avoir cette petite lueur de chance qui le guide et lui permet d'échapper aux ténèbres d'une fin certaine.

En effet, le module d'exploration et d'analyse est indemne, et grâce à lui il va pouvoir en apprendre plus sur sa nouvelle planète, qu'il espère temporaire. De plus, il y a quelque part dans le stock des rations de survie qui ne nécessitent pas d'eau pour être comestibles, sans doute assez pour tenir le coup quelques jours. Ne reste plus qu'à trouver tout ça sans l'aide de l'ordinateur de bord, qui a rendu l'âme lorsque la salle des batteries est venue rencontrer celle des machines. Heureusement, Max est un mécano et c'est son boulot de connaître le vaisseau par coeur. Du moins, lorsque celui-ci est en un seul morceau. Et c'est ainsi que Max se dirige vers la salle de préparation, celle où tout le matériel destiné aux sorties dans l'espace est stocké. Il compte lancer le programme "bases" du robot d'exploration, qui est assez lent, pendant qu'il cherche à manger. Un plan plutôt bien pensé.

Lorsqu'il arrive sur place, la pièce est méconnaissable. Ce qui d'origine était un octogone régulier au sol parfaitement lisse n'est aujourd'hui plus qu'un triangle aux contours mal définis et dont une partie du plancher sert également de mur. Un sacré choc en vérité, Max a eu de la chance d'avoir profité des ballons de protection de la cabine de pilotage. Ca l'a sonné, mais il est vivant. Qu'il le mérite, c'est autre chose. Mais après tout s'il est tout seul, il a tous les pouvoirs, et autre chose à faire que de se mettre au trou. Alors, Max entreprend la préparation du robot d'exploration. Pour commencer, il le détache, il a vu faire l'équipage de nombreuses fois et sait comment s'y prendre. La seule différence en réalité, c'est que d'habitude le bâtiment est posé comme il se doit et le sol est parfaitement plat. Dès qu'il est détaché, le robot se jette sur Max, qui esquive d'un bond maladroit, et va s'écraser plus bas, après avoir déambulé tant bien que mal sur ce plancher en pente assez raide. Max se laisse glisser jusqu'à lui, et constate qu'un morceau, le compartiment d'analyses, s'est détaché pour aller s'exploser sur le sol de la planète. Il aurait pu s'en douter, il sait très bien que ces petites bêtes sont fragiles : il doit sans arrêt les réparer lorsqu'ils sont pourtant utilisés en conditions normales. Mais dans la précipitation, il n'a pas fait attention. Si seulement il avait activé le module avant de le détacher, celui-ci aurait sans doute réussi à s'en sortir sans trop de dommages...

Max, que la journée commence sacrément à fatiguer, prend toutes ses précautions lorsqu'il libère le second module d'exploration. L'obscurité ne l'y aide pas beaucoup, la planète ne recevant qu'un filet de lumière d'une étoile lointaine et le vaisseau ne possédant plus que quelques petites veilleuses rayonnant faiblement sur un circuit de secours. Pour commencer, il l'active et lance le protocole de "sauvegarde", un programme qui mobilise l'intégralité des capacités du robot pour se préserver de toute destruction, à moins de devoir pour ça mettre en danger un être humain. Puis, il met en place un câble de sûreté qu'il accroche à Carlingue, le nom qu'il a choisi au petit robot laconique, et le fait délicatement descendre jusqu'au sol. Enfin, il le rejoint et lance le programme "bases". Immédiatement, Carlingue se met à scanner son environnement et entame la première phase. Max, soulagé que sa survie ait désormais une chance, s'écroule au sol. Rien ne presse plus maintenant, la technologie a pris le relai. Quand il aura faim, il ira chercher à manger. Mais pour l'instant, il ne pense qu'à goûter à un repos bien mérité.

Et ainsi, Max s'endort, à même le sol de son nouveau monde d'adoption.


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